17 mars 2022 - Journée d'étude ASFC «Nantes - Ombres & Lumières»
 

MATIÈRES PREMIÈRES et ALIMENTATION

par

François LEBAS * et Paméla VASTEL **

*Association Cuniculture, 87A Chemin de Lasserre, 31450 Corronsac, France
** Techna France Nutrition, BP10, 44220 Couëron, France

Introduction
Trente six communications (1 rapport de synthèse espagnol et 35 communications courtes) ont été présentées dans la section "Aliment et Alimentation", dont 11 signées ou co-signées par des équipes françaises. En outre, 9 communications correspondant à la même session ont été acceptées par le comité scientifique du Congrès mais n'ont pas été présentées en séance.
Mais plusieurs communications concernant directement les possibilités d'utilisation de matières premières ou les techniques d'alimentation, ont été présentées ou simplement acceptées dans d'autres sessions en raison des effets principaux étudiés. Elles ont également été intégrées à notre analyse pour leur partie concernant la relation aliment-performances.
Par ailleurs, pour l'étude des matières premières et du mode d'alimentation employé lors des expérimentations, toutes les communications du congrès ont été potentiellement prises en considération.
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1 - Le rapport invité (Alimentation de la femelle reproductrice)
  Ce rapport a été rédigé conjointement par les équipes espagnoles de Valence et de Madrid (Martinez-Paredes et al.). Nous reprenons ci-après leur résumé en y ajoutant quelques commentaires.
Dans cette revue sont résumées les dernières connaissances sur la nutrition des lapines, destinées à compléter les connaissances déjà acquises sur les besoins nutritionnels et les stratégies d'alimentation des lapines jeunes (future reproductrices) et adultes, compte tenu de la production et des problèmes de santé.
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  La jeune lapine doit atteindre un niveau de maturité (état corporel) adéquat au moment de la première insémination artificielle (IA), ni trop maigre, ni trop grasse, pour affronter sa vie productive avec des garanties minimales : environ 7,0 mm d'épaisseur de gras périrénal, une concentration de 2,8 ng/mL de leptine plasmatique et des teneurs corporelles d'environ 18 % et 15-20 % de protéines et de matières grasses respectivement). Ces paramètres biologiques optimum ne sont pas déterminables dans les élevages du terrain. Ils permettent, en unité de recherche, de fixer le plan d'alimentation optimum des futures reproductrices dans les élevages de production, compte tenu éventuellement de chaque type génétique.
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  Ces objectifs peuvent être atteint en limitant la consommation d'aliments à partir de 12 semaines jusqu'à la première IA ou en alimentant les lapines à volonté avec un régime fibreux pauvre en énergie (<10,5 MJ ED/kg) à partir de 60 jours d'âge jusqu'à la première mise bas.
Une fois que la lapine est entrée en reproduction (peut être avant mais on n'en sait rien) l'augmentation des acides gras 3 (ou réduction du rapport oméga 6/ oméga 3), celle des fibres solubles (en cas de risque d'entéropathie épizootique) et des rapports Arg/Lys et Gln/Lys dans l'aliment peuvent aider à améliorer les performances de reproduction des lapines, bien que leur niveau optimal dans les aliments reste encore à déterminer. Il est recommandé d'éviter chez les lapines, un bilan énergétique trop négatif avant chaque mise bas. La supplémentation en précurseurs du glucose pour réduire l'incidence de la cétose pourrait être utile. Toutefois le risque de cétose, vrai problème chez la vache laitière, n'a pas été clairement démontré chez la lapine, voire nié par certains auteurs. D'ailleurs, les auteurs de la revue, n'en apportent pas la preuve.
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  La formulation de régimes alimentaires différents pour la lapine et pour sa portée afin de mieux répondre à leurs besoins respectifs et de s'assurer de leur santé serait une option à considérer à condition toutefois que cette option soit utilisable dans l'élevage considéré. L'influence de la mère sur le microbiote et le statut immunitaire de sa portée et sa modulation potentielle à travers l'alimentation (maternelle ou spécifique jeune) ouvre un nouveau domaine de recherche qui mérite plus d'études, à réaliser dans un avenir proche.
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2. Utilisation des matières premières
  2.1. Études de matières premières ± nouvelles
a/ Matières premières tropicales et exotiques
  Les travaux présentés ont surtout fourni la confirmation des possibilités d'utilisation de certaines matières première connues permettant d'alimenter les lapins en milieu chaud. Ainsi un travail réalisé en Côte d'Ivoire (Kouadio et al.) a confirmé la possibilité d'utilisation de Stylosanthès guianensis séché dans la ration des lapins en croissance (testé à 10, 20 et 30%de la ration). Cette légumineuse fourragère proche de la luzerne est intéressante comme source de fibres et de protéines pour la constitution d'aliments tropicaux équilibrés.
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  Un travail nigérian (Oyedele et al.) a confirmé que les feuilles fraiches de Moringa oleracea sont parfaitement utilisables pour nourrir les lapins en croissance en complément d'un aliment concentré en remplacement de Centrosema pubescens. Dans l'essai, les feuilles représentent environ la moitié de l'ingestion quotidienne de MS. Par contre, ces feuilles de Moringa séchées, si elles permettent de remplacer jusqu'à 30% de la ration base de lapins en croissance sans altération du statut physiologique des animaux, entrainent une certaine réduction de la vitesse de croissance des lapins par rapport au témoin (Nursita et al.) (tableau 1)
  Tableau 1 : Performance de croissance de lapins pour lesquels une partie de l'aliment de base a été simplement remplacée par des feuilles séchées de Moringa oleifera (Oyedele et al.)
 
    % de Moringa oleifera 0%¨(témoin) 10% 20% 30%
      Ingéré quotidien (g) 62,3 64,2 61,5 65,2
      Gain moyen quatidien (g/jour) 25,0 21,8 21,0 23,0
Le fourrage d'Euphorbia heterophyla peut représenter 50% de la ration des lapins en croissance selon Kouakou et al., voire jusqu'à 70% selon des travaux antérieurs de cette équipe ivoirienne. Cette plante herbacée (à port dressé de 20 à 60 cm) considérée en général comme une adventice des cultures (de coton, de riz, …) est bien consommée par les lapins et permet d'accroitre très significativement la teneur en acides gras oméga-3 dans les lipides des lapins (lipides musculaires, gras périrénal) même après la distribution du fourrage pendant seulement le mois précédant l'abattage (tableau 2). Malheureusement les auteurs n'ont pas indiqué les performances de croissance ni les teneurs en chacun des acides gras oméga-3 mais seulement des teneurs globales.
  Tableau 2 : Proportions des acides gras insaturés au sein des acides gras totaux dans les tissus des lapins après consommation d'une ration à base de d'euphorbe pendant zéro (témoin), 1 mois ou 3 mois avant abattage (Kouakou et al.)
 
  Au Venezuela une équipe (Parra-Almao et al.) a essayé de nourrir les lapins en croissance avec un mélange composé de feuilles de Leucaena leucocephala (50%) complémenté avec de la mélasse de canne (0 à 25%) et du son de riz (50 à 25%). Les lapins ont relativement bien toléré les régimes contenant 25% de mélasse ou 50% de son de riz + 50% de feuilles de Leucaena, mais avec les régimes expérimentaux la vitesse de croissance a été très nettement inférieure à celle des animaux témoin recevant un aliment commercial (environ 7 g/j contre 17 g/j) alors que leur consommation alimentaire représentait 75% de celle des animaux témoin. Le déséquilibre nutritionnel était tel qu'il ne faut pas être étonné des mauvaises performances obtenues avec les régimes expérimentaux.
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  Dans un autre essai de la même équipe vénézuélienne (Hernandez et al.), les auteurs ont cherché à estimer la valeur nutritive des gousses de Prosopis juliflora, un petit arbre de la famille des légumineuses (mimosé), originaire d'Amérique centrale et disséminé par l'homme (envahissante) à travers le Monde dans les zones semi-arides. Après séchage et broyage les gousses ont été mélangées avec de la mélasse 50-50% et ensilées pour au moins 14 jours. La préservation par ensilage a été utilisée car les gousses ne sont disponibles que quelques mois au cours d'une année. Ce mélange (11% de protéines et 41% d'ADF) a été utilisé pour fabriquer des aliments expérimentaux contenant 24 à 53% du mélange, 21 à 50% de feuilles broyées de Leucaena et 25% d'un aliment commercial pour lapins. Le gain de poids des lapins au cours des 9 semaines d'essai a été nettement plus faible avec les aliments expérimentaux qu'avec l'aliment commercial servant de témoin : 5 à 10 g/jour vs 18 g/j pour le témoin. A noter cependant que la croissance expérimentale a été la meilleure (10 g/j) avec l'aliment contenant 53% de mélange à base de gousses de Prosopis juliflora et le coût de l'alimentation a été à peine supérieur à celui obtenu avec l'aliment commercial (différence NS).

Au Nigeria (Adetola et al.), un essai d'alimentation des lapins en croissance a montré qu'il est possible d'incorporer 10% voire 20% d'un mélange de feuilles de tournesol sauvage (Tithonia diversifolia) + sang bovin d'abattoir (proportion 4 :1 de produits séchés au soleil) en remplacement du tourteau d'arachide de la ration, sans altérer significativement les performances de croissance.
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  b) Les matières premières potentiellement disponibles en zone tempérée
  Au cours d'un essai conduit sur 3 cycles de reproduction et la descendance, un essai français (Gayrard et al.) a montré qu'il est possible d'incorporer 26% de sainfoin déshydraté (testé à 0 - 13 et 26%, formule alimentaire non précisée) dans la ration des lapines reproductrices, puis dans celle de leurs descendants en engraissement. La prolificité a été légèrement améliorée (9,0 - 9,9 et 10,5 nés vivants/MB) et la proportion de mort-nés réduite (15,7 - 10,5 - 8,9%), sans altération du poids des lapereaux au sevrage. Par contre la vitesse de croissance en engraissement a été légèrement réduite : 44,2 - 43,4 et 43,2 g/jour pour les taux d'incorporation de 0 - 13 et 26% (P<0.001). L'absence de toute indication sur les formules alimentaires employées ne permet pas de proposer d'explication pour cette légère baisse de performance. Par contre il faut souligner que la mortalité en maternité puis en engraissement a été faible à très faible sur l'ensemble de l'essai (6,2% en maternité et 0,6% en engraissement).
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Par ailleurs, une étude hongroise (Atkai et al.) a montré que logiquement un mélange fourrager de trèfle des prés (Trifolium pratense) et de lotier corniculé (Lotus corniculatus) peut sans problème être inclus dans la ration des lapins en croissance, au moins jusqu'à 26% de la ration en remplacement total de la luzerne déshydrate (testé à 0 -15 - 20 et 25,6% - tableau 3)
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  Tableau 3 Performances de croissance des lapins entre 37 et 84 jours en fonction du taux du mélange fourrager trèfle+ lotier dans l'alimentation (Atkari et al.)
 
  Contrairement à ce qu'affirment les auteurs, le lotier corniculé, même seul, n'a jamais été considéré comme toxique pour le Lapin et a même été fortement conseillé pour l'élevage des lapins au milieu du 20e siècle. Si par la suite il a été délaissé au profit de la luzerne, c'est pour des raisons purement agronomiques (rendement/ha, récolte…).
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  Si dans les essais ci-dessus la luzerne a pu être totalement remplacée par d'autres légumineuses fourragères, dans un essai conduit au Brésil (Craveiro et al.), les auteurs ont constaté une baisse de la vitesse de croissance 31-70 j, si le taux de luzerne passait de 27% à 0% (GMQ variant de 37 à 33 g/jour). Ils ont même proposé un taux optimum de 25,6% de luzerne pour l'aliment d'engraissement des lapins. Avec un peu d'expérience on peut supposer que les plus faibles performances constatées avec le régime sans luzerne sont attribuables plus à un problème de formulation alimentaire incomplètement équilibrée qu'à une vertu particulière de la luzerne
Une étude portugaise (Alves et al.) a abordé l'utilisation des racines de carottes (écarts de tri) dans l'alimentation des lapins en croissance. La motivation initiale de ce travail est pour le moins originale puisque les auteurs justifient leur étude par les effets favorables des caroténoïdes et des fibres alimentaires de la carotte sur la santé chez l'homme. Incorporées au taux unique de 15% dans cette étude, principalement en remplacement de céréales (blé, orge) les carottes n'entrainent pas de variation significative de la vitesse de croissance 35-63 j. des lapins, mais dégradent l'indice de consommation : 2,70 vs 2,43 pour le témoin
  Une étude brésilienne (Santinoni el al.) a montré que l'incorporation de graines de haricot (brisées) extrudées dans l'alimentation des lapins jusqu'à 20% (testé à 0 -5 -10 -15 et 20%) dans une ration équilibrée (16% de protéines , 31% de NDF) n'entraine par de modification des performances de croissance : GMQ moyen de 38,7 g /j et IC de 2,83, mais augmente linéairement le coût alimentaire avec le taux d'inclusion des haricots extrudés en raison des dépensées liées à l'extrusion.

Les travaux de Dorbane et al. venant à la suite de ceux présentés par la même équipe algéro-française qu'au Congrès de Qingdao en 2016 ont permis de déterminer que les glands de chêne vert algérien contiennent environ 17,9 MJ d'énergie digestible par kg de MS, valeur supérieure à celle généralement admise pour les céréales (autour de 14,5 MJ). Par contre la teneur en protéines est très faible (5,5% de protéines brutes) même si ces dernières semblent assez digestibles (proche de 80%). Ainsi les glands sont une source intéressante d'énergie digestible pour l'alimentation du Lapin mais nécessitent entre autres une forte complémentation par une ou plusieurs sources de protéines.

Dans le travail égyptien d'Abdel Khalek et al., la moitié du tourteau de soja classique d'une ration d'engraissement (16% de la ration) a été remplacée par un tourteau de soja "by -pass " préparé classiquement pour les ruminants (testé à 0 - 4 et 8% de la ration). Le tourteau de soja traité a permis d'accroitre le poids final des lapins de 7% , soit un poids finalr de 1,65 -1,68 et 1,77 kg pour les 3 réimes(20 lapins par lot au départ) ainsi que l'efficacité alimentaire. Mais les auteurs ont omis de préciser la durée d'engraissement et la présence d'une éventuelle mortalité
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  L'incorporation de 15% de graines de lupin en remplacement total du tourteau de soja (Almeida et al , Portugal) ne modifie pas la vitesse de croissance lorsqu'il s'agit de lupin jaune mais la réduit légèrement lorsqu'il s'agit de lupin blanc (poids final de 2,61 kg contre 2,73 pour le lupin jaune et 2,74 kg pour le témoin), sans modification significative du rendement à l'abattage (à 69 jours). Pour les deux types de lupin, la teneur en acides gras polyinsaturés des lipides musculaires est améliorée : 27,4 et 29,0% pour les lupins blanc et jaune contre 24,1% pour le témoin. Le rapport des acides gras oméga 6/ oméga 3 est significativement réduit pour le lupin blanc (5,4) alors qu'il est accru pour le lupin jaune (8,75) comparativement au témoin soja (rapport de 7,08).

Dans un essai français (Guillevic et al.) impliquant 777 lapines reproductrices il a été démontré que l'incorporation à la ration de 5% du mélange Tradilin® à base de graines de lin extrudées riches en acides gras oméga-3, permet d'accroître significativement les performances de reproduction des lapines : prolificité 9,67 sevrés /MB vs 8,69 pour le témoin, mais aussi le poids au sevrage des lapereaux : 913 g vs 811 g. La présence d'un fort taux d'acides gras oùméga-3 renforce aussi les défenses immunitaires des animaux
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  Un travail algérien (Harouz-Cherifi et al.) a confirmé que l'incorporation de la drêche de brasserie (produit local testé à 0 - 20 et 30 %) dans la ration de lapins, en substitution partielle du soja, de la luzerne et de l'orge, permet les mêmes performances que l'aliment témoin, sans affecter l'état sanitaire, les caractères de croissance ou d'abattage.
La pulpe de la gousse de caroube restant après la récolte des graines (90% du poids de la gousse brute), est riche en sucres solubles (45-52%) mais pauvre en protéines (2-7%) Testée au taux de 0 - 12,5 et 25% dans la ration essentiellement en replacement de l'avoine (Ribeiro et al.) cette pulpe peut être sans problème incorporée au taux de 12,5% voire 25% dans la ration des lapins en croissance (GMQ de 46,3 - 46,9 et 44,8 g/j pour les 3 taux d'incorporation). Son utilisation jusqu'à 25% n'a pas d'effet sur la morphologie intestinale ou les fermentations caecales
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  La pulpe de racine de chicorée restant après extraction partielle de l'inuline, est riche en fibres digestibles (CUDa de 56% pour le NDF et 83% pour l'ADF), mais pauvre en protéines (~8%). Elle a une teneur en énergie digestible élevée : 12,14Mj/kg MS (Guermah et Maertens). Par rapport au témoin, introduite dans la ration de lapins en croissance au taux de 30% en remplacement de la ration de base, la pulpe de chicorée n'entraine aucun effet négatif sur la vitesse de croissance (GMQ de 52 g/j contre 48 pour le témoin - 8 lapins/lot) et même une amélioration significative de l'indice de consommation : 3,03 vs 3,70.

Enfin, selon deux études italo-hongroises sur l'huile de pupes de vers à soie (Bombyx mori) récupérée après récolte de la soie brute (Matics et al. et Singh et al.), il s'avère que cette huile peut remplacer l'huile de tournesol dans la ration des lapins (testée au taux de 1,3%), sans modifier la croissance ou l'efficacité de la digestion par les animaux.
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  c/ Les additifs alimentaires
  Dans cette catégorie, nous avons traité des produits incorporée à moins de 4% dans la ration et ayant des effets sur les lapins alors même que les éléments nutritifs les constituants sont insuffisants pour avoir des effets sur l'équilibre nutritionnel clasique de la ration. Les effets observés sont généralement un certain contrôle de la flore digestive (le microbiote) ou des effets sur la régulation physiologique de l'organisme des lapins (anti-oxydant, ….)
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  L'incorporation de 3% de grande mauve séchée (Malva sylvestris) connue autour de la méditerranée pour ses vertus médicinales, améliore la consommation et le poids vif de lapins et réduit le taux de cholestérol et de lipides dans le sang (Boudour et al., Algérie)
L'addition de 200 mg/kg d'armoise annuelle en poudre (Artemisia annua) dans l'alimentation des lapins (20 lapins /lot) améliore leurs performances de croissance et leur indice de consommation (3,23 vs 3,79 pour le témoin). Cela réduit aussi la sensibilité de leur viande à l'oxydation lors de la conservation (Basyony et al., Egypte)
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  Un résultat similaire, y compris la résistance à l'oxydation ; a été décrit par Abel Khalek et al.( Egypte) après addition de 200 mg/kg de farine de courge (Curcuma longa) : GMQ de 25,3 vs 21,1 g/j et IC de 3.32 vs 3.79. (20 lapins/lot)
Une autre étude égyptienne (El Gindy et al) a montré qu'en période de fortes chaleurs (29 à 35°C) l'addition de mannooligosaccharides à l'aliment d'engraissement ( testés à 0 - 0,5 - 1,0 et 1,5% de l'aliment) permet de légèrement améliorer la vitesse de croissance des lapins (20 pat lot) : GMQ de 13.2 - 14,6 - 15,3 et 14,9 g/j. (P=0,023) pour les 4 lots expérimentaux malgré une baisse significative de la consommation alimentaire : 52,4 - 50,9 - 47,1 et 48,6 pour les 4 lots (P <0,001).
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  L'addition de 10 à 100 mg/litre de spiruline (Spirulina platensis), une micro-algue (ou une bactérie selon certans spécialistes) des eaux tropicales ± saumâtres, dans l'eau de boisson de lapins en engraissement n'a aucune influence sur leur performance de croissance. L'absence d'effet de la spiruline sur les animaux provient d'une erreur de base des auteurs (Sangare et al.) quant au protocole expérimental mis en œuvre. En effet, cette algue très riche en protéines (60-65% /MS) et équilibrée en acides aminés est cultivable (et effectivement cultivée) industriellement. Elle aurait due être testée aux environs de 2-10% de la ration en remplacement d'un bon tourteau ou d'une farine animale comme c'est le cas pour les autres espèces (poulet, porc), c'est-à-dire représenter un apport alimentaire environ 100 fois plus important que dans cet essai. Avec un tel protocole la seule conséquence qu'on aurait pu attendre, était un effet négatif lié à la pollution de l'eau de boisson due au développement éventuel de bactéries pathogènes aux dépens de l'algue.
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  L'équipe de l'Ecole d'agronomie de Madrid a présenté 3 communications sur l'introduction de cellobiose et de xyloologosaccharides dans l'eau de boisson des lapins en engraissement (Farias et al.). La cellobiose utilisée à raison de 7,5 g/litre d'eau de boisson a un effet positif non significatif (P= 0,105) sur la vitesse de croissance des lapins et aucun effet sur la viabilité des animaux. L'utilisation de xyloologosaccharides (7,7 g/litre) n'a d'effet significatifs ni sur les performances de croissance ni sur la viabilité des animaux entre le sevrage (31j.) et l'abattage (59 j.).
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  L'équipe française de MiXscience (Menini et al.) a monté que contrairement à ce qui est observé chez la vache, l'incorporation de propylèneglycol (PG) dans l'eau de boisson des lapines reproductrice (0,4%) pendant 4 jours avant la mise bas n'a pas d'effet sur le poids vif des lapines ni sur le poids des lapereaux au sevrage. Un effet positif non significatif sur la prolificité des lapines mériterait des études ultérieures. Seul un effet temporaire significatif a été observé sur le poids des lapereaux à 21 jours, mais il n'a pas été retrouvé au sevrage 10 jours plus tard. La distribution du même PG entre 14 et 18 jours de lactation n'a que des conséquences négatives. Elle doit donc être évitée.
La même équipe (Gohier et al) a testé l'incorporation de 0,5% de l'additif Cunidigest®  à l'aliment (mélange d'acides organiques et d'huiles essentielles). L'essai a été conduit dans 4 élevages commerciaux et un total de 6 bandes correspondant à 2 fois 1560 lapins en engraissement, systématiquement rationnés. Avec le Cunidigest® la mortalité globale a été significativement réduite (5,1% vs 9,6% pour le témoin) de même que la morbidité (11,9% vs 20,8%). Par contre la croissance des lapins n'a pas été modifiée.
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  L'addition d'extraits de châtaigne ainsi que de marc de raisin (tous deux riches en tannins) a été testée à 0,2 et 0,4% dans l'aliment d'engraissement par l'équipe italienne de Padoue (Xiccato et al.). Aucun effet n' a été détecté sur la mortalité ou la vitesse de croissance (0,4% et 58 g/j. en moyenne) malgré des modifications significatives de la digestibilité des aliments, plus favorables dans le cas de l'extrait de marc de raisin que pour l'extrait de châtaignes.Un travail français (Colin et al.) avec deux répétitions impliquant au total 1684 lapins a montré qu'un additif commercial, le Diamond C Original XPC à base de levure Saccharomyces cerevisiae, introduit à raison de 1g/kg dans l'aliment d'engraissement des lapins est une solution intéressante pour améliorer la croissance (GMQ 46-70 j de 35g/j. vs 33,4 g/j. pour le témoin) et la viabilité des animaux, notamment dans un contexte de performances dégradées (mortalité 46-70 j. de 6.8%% vs 12.7% chez le témoin) ou pour la production de " lapins lourds ".

Un autre essai français de la même équipe (Malabous et al.) impliquant au total 2 cycles de production et 277 mises bas au total, a montré que l'incorporation de 1,32 g/kg de Metalac® uniquement dans l'aliment de maternité (un additif commercial à base de produits de fermentation de 2 souches de lactobacilles, Lactobacillus farciminis et Lactobacillus rhamnosus ) permet de sevrer un peu plus de lapereaux (8,86/MB vs 8,71 P= 0.009) et de produire des lapins un peu plus lourds à l'abattage (2,43 kg vs 2,40 pour le témoin, P=0.10), augmentant ainsi le nombre et le poids des lapins commercialisables : 17,3 kg vif par mise bas vs 16,3 kg vif pour le témoin . En outre, le rendement à l'abattage mesuré sur environ 1000 lapins par lot, a été significativement amélioré : 55,0% vs 54,2%.
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  Enfin nous devons aussi signaler la courte revue de Lebas (France) sur l'utilisation de la bentonite comme additif technologique dans l'alimentation des lapins. Autorisée en France jusqu'à 2,0% dans les aliments pour animaux, cette argile à structure lamellaire a l'intérêt d'améliorer la qualité des aliments difficiles à agglomérer, y compris en présence d'huile ajoutée. En outre, sa structure lamellaire permet de bloquer d'éventuelles mycotoxines comme l'aflatoxine B1 et de supprimer ainsi leurs conséquences négatives. Mais pour les mêmes raisons de structure, la bentonite bloque aussi les coccidiostats comme la Robénidine, la rendant inefficace. Si la bentonite était encore assez souvent utilisée à la fin du 20e siècle , aucune des formules alimentaires présentées lors de ce Congrès n'en contenait.
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  2.2. Les différentes matières premières utilisées dans les aliments expérimentaux utilisées dans les communications du Congrès
  Les auteurs de 38 communications (sur 238 communications courtes) ont indiqué la composition centésimale des aliments expérimentaux utilisés, le plus généralement pour des lapins en engraissement, mais aussi pour des reproductrices ou des lapins à fourrure. Nous avons relevé la formule des différents aliments témoin, ainsi que celle des aliments expérimentaux ayant permis des performances au moins similaires à celles obtenues avec l'aliment témoin (différence non significative ou amélioration), soit au total 56 formules

L'hypothèse forte que l'on peut faire est que ces auteurs considèrent pour les aliments témoins qu'il n'y a pas de risque particulier à employer ces matières premières dans l'alimentation des lapins et que les matières premières expérimentées n'ont pas de contre-indication aux taux étudiés puisque les performances sont au moins égales à celle du témoin. Les différents taux employés pour les principales des 60 matières premières concernées sont donc des indicateurs des possibilités d'emploi (tableau 4).
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  Tableau 4 : Principales matières premières (MP) utilisées dans 56 formules expérimentales avec indication de la fréquence d'emploi (si présence dans au moins 4 formules), du taux moyen d'incorporation lorsque cette MP est utilisée, du taux maximum d'emploi observé.
 
  Au total 95% des aliments présentés contiennent des céréales, au taux moyen 21,1%. Les céréales les plus représentées sont le maïs (48% de formules) l'orge et le blé. L'avoine n'est présente que dans 2 formules, et il faut remarquer qu'aucune formule n'a fait appel au riz. au seigle ou au sorgho.
Les issues de céréales sont présentes dans 86% des formules au taux moyen de 24,2% c'est-à-dire un taux un peu plus élevé que celui des céréales entières. Le son de blé est de loin l'issue la plus représentée (84% des formules, taux d'incorporation de 21,9%) loin devant le son de riz et le son de maïs présents dans seulement 4 et 3 des 56 aliments présentés au congrès.

La luzerne (séchée au soleil ou déshydratée) est présente dans 73% des aliments. Lors des deux précédents congrès cette proportion était de 52% en 2016 et 64% en 2012. Son taux moyen d'incorporation est de 27,2% dans les aliments, proche des taux observés en 2016 et 2012 : 28,7% et 31%. D'autres sources de fibres et éventuellement de protéines sont aussi souvent utilisées telles que la pulpes de betteraves (21% des formules, avec un taux de 13,6%) ou la paille de céréales (16% des formules, avec un taux moyen de 8,9%), ou la paille et les pellicules de soja (12,5% des formules et un taux de 12,4%) Dans cette catégorie des aliments sources de fibres ± digestibles les équipes de recherche ont aussi utilisé des drèches de brasserie, du marc de pomme ou de raisin, mais aussi du foin de trèfle, des fanes d'arachide, les déchets de lin ou différentes graminées tropicales palnte entière.

Le dernier élément majeur en fréquence dans les formules utilisées est le tourteau de soja présent dans 77% des aliments (taux de 11,8%) nettement devant le tourteau de tournesol présent dans 27% des formules au taux de moyen de 11,9% similaire à celui du tourteau de soja. Globalement 86% de formules contiennent au moins l'un de ces deux tourteaux. Parmi les autres tourteaux on peut mentionner le tourteau de palmiste et de manière plus anecdotique les tourteaux d'arachide, de coprah, de lin, de colza, de pépins de raisin ou de coton. Les graines oléo-protéagineuses ont été beaucoup moins utilisées (chacune présente dans une et deux formules seulement sur les 56 relevées). On peut citer les graines d'arachide, de soja, de coton, de lupin ou de colza. Par contre aucune formule n'a fait appel au pois fourrager ou à la féverole.

Une mention particulière concerne la mélasse présente dans 39% de formules au taux de moyen de 2,37% et un taux maximum d'incorporation de 5,5%. Mais comme il a été montré plus haut, dans certaines conditions la mélasse peut représenter 25% de la ration (Parra-Almao et al.) sans altérer la santé des lapins.
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3. Stratégies et techniques d'alimentation
  3.1. Mode d'alimentation des lapins expérimentaux
Avant d'analyser les communications abordant spécifiquement les techniques d'alimentation et la composition des aliments, il nous a semblé intéressant de voir comment les lapins expérimentaux ont été alimentés lors des multiples essais à l'origine des communications du Congrès, toutes sections confondues.
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  Le mode de distribution des aliments a été indiqué dans 58% des communications (sur 111 communication où cela aurait été possible ou souhaitable).
  En maternité, sur les 31 communications dont l'information est disponible, 100% des femelles sont alimentées à volonté, avec un aliment granulé.
A noter deux originalités françaises : un essai ayant testé l'effet d'un temps de 8h sans accès à la mangeoire en présevrage, et un ayant testé un aliment distribué au nid sous forme de gel pour les jeunes lapereaux.
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  En Précheptel, sur 3 essais pour lesquels nous avons l'information, l'alimentation est toujours de type granulé. Pour un essai, la distribution n'est pas indiquée, pour un essai, les jeunes femelles sont rationnées quantitativement et enfin un essai compare des femelles à volonté et des femelles rationnées quantitativement.
 

Enfin, en engraissement, 76 papiers indiquent le mode d'alimentation des lapins expérimentaux :

=> 2 essais se passent dans le cadre de pâturage, dans des essais en agriculture biologique.
=> dans 5 essais, les animaux ont à disposition du granulé et du fourrage séché (papier indonésien), ou du foin (papier ivoirien) ou des fourrages frais (papiers ivoirien, nigérian et sud-africain).
=> 2essais avec tout ou partie des groupes recevant un aliment sous forme de farine (papiers vénézuélien et brésilien), dans le cadre d'une alimentation ad libitum
=> 67 essais ont été conduits avec de l'aliment granulé : 63% ad libitum, 13% comparant des régimes ad lib à des régimes rationnés (en quantité et pour un essai, en durée), et dans 19% des cas, les lapins étaient rationnés (3 papiers sur 13 avec un rationnement horaire).
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  3.2. Stratégies d'alimentation des lapins en engraissement
  Lors de ce 12ème congrès, beaucoup de communications ont été consacrées à l'étude de l'effet des stratégies d'alimentation en engraissement sur les performances (8 communications contre 4 lors du dernier congrès de Qingdao).
Diverses stratégies d'alimentations ont été étudiées, parmi lesquelles :
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  a/ les modalités de rationnement
  Un premier papier de Garda-Salmon et al (France) a traité de l'effet de différentes modalités de rationnement en engraissement sur la croissance et le développement mammaire des lapines futures reproductrices. Ainsi deux rationnements ont été testés : G1 rationnement strict (73 g par tête au sevrage +15g/sem jusqu'à 63j), et G2 rationnement plus léger (93 g par tête au sevrage +18 g/sem jusqu'à 63j). Les deux groupes ont ensuite été alimentés à volonté de 63j, à 90j, puis ont reçu une ration de 150g/j à partir de 90j et jusqu'à la première IA (avec un flushing ad libitum de IA-6j à IA+2j). Les résultats ont montré que la restriction initiale n'a pas affecté le poids à la 1ère IA, ni les performances de reproduction au 1er cycle (fertilité, prolificité) ou encore la santé des lapines. Notons toutefois que la croissance ne s'est pas faite au même moment de la vie des animaux: plus de gain de poids sur la première période pour les femelles de G2 (restriction moins sévère), alors que les femelles de G1 ont fait une croissance compensatrice sur la phase 90-126j. Quant aux examens histologiques des tissus mammaires, ils n'ont révélé aucune différence significative dans la morphologie des tissus entre les 2 groupes. Par contre, les gènes de la synthèse des protéines du lait et des enzymes de la lipogenèse FASN ont été significativement augmentés dans le groupe d'alimentation la moins stricte G2 (P<0,01). Ceci suggère une augmentation de la synthèse des protéines et des lipides du lait dans le tissu épithélial mammaire des femelles recevant une allocation alimentaire plus élevée en période post-sevrage. Dans l'ensemble, ces résultats indiquent que la stratégie d'alimentation au début de la vie reproductive des lapines peut influencer leur développement mammaire au cours de la première gestation et avoir un impact potentiel sur la lactation ultérieure en faveur de la restriction alimentaire la moins stricte entre 5 et 9 semaines.
 

Bien que cette étude n'ait pas mis en évide,ce d'effet sur le poids vif et les premières performances de reproduction, il serait intéressant de mesurer les effets à long terme de la courbe de croissance (plus précoce pour le rationnement modéré, et une croissance compensatrice pour le rationnement strict). Ce travail a permis de mettre en lumière et d'alerter sur l'effet des pratiques du rationnement sur le développement mammaire. En effet, comme les femelles suivent souvent la stratégie d'alimentation des lapins de chair, elles peuvent être trop rationnées en début d'engraissement.
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  Pascual et al. (Espagne) se sont intéressés à l'utilisation de la restriction alimentaire pour le contrôle de la santé des animaux en engraissement, afin de permettre la réduction de l'utilisation des antibiotiques. Ainsi, de 35 à 63j, 4 groupes de lapins ont reçu, soit une alimentation ad libitum avec des aliments médicamenteux (AdLibMed), soit une alimentation ad libitum avec des aliments sans addition médicamenteuse (AdLibNoMed), soit une alimentation restreinte (80% de l'ad lib) avec alimentation médicamentée (RestrMed) soit enfin une alimentation restreinte (80% de l'ad lib) avec des aliments non médicamentés (RestrNoMed). Les lapins ont ensuite tous été alimentés avec un aliment non médicamenteux, distribué à volonté de 63 à 70j (abattage). Au global, les auteurs ont conclu que la restriction alimentaire a réduit le GMQ sans améliorer significativement l'IC même si ce dernier a été réduit de 0,09 pt. Quant au sanitaire, peu importe la stratégie d'alimentation le retrait des antibiotiques (ici Valdemuline, OTC et coccidiostatique) a augmenté la mortalité (+3pts pour l'alimentation ad lib (+47%) et +4.8pts pour l'alimentation restreinte (x 2.2)).
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Ce congrès a été l'occasion pour l'INRAE de Toulouse (Gidenne) de réaliser une rétrospective sur 10 années de recherches sur la régulation de l'ingéré, en se basant sur la littérature existante et des entretiens avec des experts :
- Impact économique : cet impact positif provient de 3 sources principales : la réduction de la mortalité en engraissement (50% de la baisse de mortalité observée ces 10 dernières années peut être attribué aux stratégies de restriction alimentaire), l'amélioration de l'efficacité alimentaire (baisse de 5% de l'IC grâce aux stratégies de restriction alimentaire) et la réduction du coût alimentaire par un moindre usage des antibiotiques.

- Impact sur la santé des lapins en engraissement : la baisse de la mortalité et de la morbidité, sans accroître les comportements anormaux entre congénères (agressivité ou compétition à la mangeoire) permet d'améliorer le bien-être des animaux, et de réduire l'usage des antibiotiques.
- Impact environnemental : les stratégies de restriction alimentaire impactent 3 aspects ; à savoir une moindre consommation de ressources alimentaires, une meilleure efficacité alimentaire, mais aussi à une réduction des excrétas. Deuxièmement, la réduction de la consommation de médicaments (antibiotiques) conduit à une réduction de la libération d'antibiotiques dans l'environnement. Enfin, la réduction de maladies digestives équivaut à un plus grand nombre d'animaux sains, et donc à un moindre gaspillage d'aliments par des animaux malades ou morts, mais aussi une réduction du nombre de lapins morts à incinérer, économisant ainsi de l'énergie.
- Impact social et autres impacts : parmi eux ont été cités, le maintien d'un certain nombre d'éleveurs (grâce aux impacts économiques et sanitaires favorables), ou encore la réduction du temps de travail si l'agriculteur a investi dans l'alimentation automatique.

Au global, les stratégies de régulation de la prise alimentaire ont conduit à la fois à une réduction des pertes de lapins en croissance (720 000 lapins sauvés/an, en France, 30 M€ sur la période 2005-2015), à une réduction de l'utilisation de médicaments (-50% d'antibiotiques utilisés pour troubles digestifs) et à une réduction des coûts d'alimentation (+ 5% d'efficacité alimentaire, soit 40 M€ économisés).
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  Plusieurs communications ont traité du rationnement par la durée d'accès à la mangeoire.

Evolution du temps d'accès à la mangeoire
Un papier italien (Birolo et al., Université de Padoue), a traité des lapins logés en parcs, ayant différents temps d'accès à la mangeoire en comparant un groupe à volonté (AL) à des groupes restreints (de jour D ou de nuit N) avec une augmentation de la ration plus ou moins rapide à partir de la 3ème semaine d'engraissement, voire un accès limité à 12h/24
Sur la période globale 28-69 jours, pour les lapins restreints, la prise alimentaire (-3,7 %) et la conversion alimentaire (-5,6 %) ont été inférieures à celles des lapins AL (P<0,001) avec les valeurs minimales dans le groupe NI (accès restreint de nuit et reprise limitée à 12h/24). La mortalité a été plus faible chez les lapins AL que chez les lapins restreints (1,6 % contre 9,0 % en moyenne ; P = 0,04), tandis que la morbidité et l'indice de risque pour la santé n'ont pas changé (IRS entre 28.2% et 40.6%). Le poids et le rendement à l'abattage n'ont pas été significativement affectés. En conclusion, le programme NI, seul programme avec un rationnement les 4 dernières semaines (12h/24 jusqu'à la vente) est la meilleure stratégie pour optimiser l'efficacité alimentaire sans altérer la croissance.
  Cette étude confirme la difficulté de remettre des animaux à volonté, même en le faisant sur une période transitoire lente.
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  Une équipe française (Rebours et al.), a étudié, au travers de deux communications, l'effet de 2 stratégies de rationnement (10h/j tout au long de l'engraissement et conmmençant à 6h/j avec une progression de +1h/semaine), à la fois sur les performances et sur le comportement alimentaire des animaux. Il en ressort qu'en rationnement horaire, le Lapin a la capacité de réguler sa consommation. En effet, les lapins alimentés avec la stratégie 6h+1h/sem (soit une moyenne de 8h sur l'engraissement) ont un poids final équivalent à celui observé dans le lot ayant une durée d'alimentation fixe de10h. Mais, comme la consommation a été moindre en première période (-15.2g/j), cela a permis de réduire l'IC global (-0.26 point), et donc de réduire le coût alimentaire (-10%). Toutefois, la réduction de la consommation en début de période a impacté le rendement à l'abattage (-0.8 pt).
Concernant le comportement alimentaire, nous avons pu apprendre à la lecture de ce travail que la vitesse de consommation augmente avec l'âge (+51% entre la 1ère et la 2ème moitié de l'engraissement), en lien notamment avec le poids vif des animaux. De plus, les lapins restreints consomment 2,5 fois plus rapidement la première heure après la distribution (en moyenne 36,8 g/h contre 14,8 g/h les heures suivantes). Enfin, plus le niveau de restriction est important, plus la vitesse horaire de consommation augmente (en première période, le groupe 6h+1h/sem consomme 1,5 g/h supplémentaire par rapport au groupe 10h), notamment la première heure (+5,5 g)
Peu d'études visent à comparer différentes stratégies horaires. Cela permet de mieux appréhender le comportement alimentaire des animaux dans ce cadre de rationnement afin de pouvoir orienter les nombreux élevages dans cette configuration d'élevage.
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  Un autre travail français (Guene-Grand et al.) a étudié la restriction horaire, mais en présevrage avec la mise en place d'un temps de 8h sans accès à la mangoire, sur les 10 jours précédant le sevrage. Cette étude a notamment mis en évidence que les lapines et leurs portées ont su s'adapter à une contrainte de temps d'accès à la mangeoire avec une CMJ et une croissance très proches entre les 2 groupes. Concernant les effets de ce jeûne, il en ressort que le poids des femelles n'a pas été affecté. Concernant la santé des lapereaux, cela n'a pu être démontré en raison d'un statut sanitaire très bon lors de l'essai (1 seul lapin mort). Enfin, concernant les performances en engraissement, bien qu'ayant un poids de sevrage équivalent, dès 42j et jusqu' à 56j les lapins du groupe ad libitum avant le sevrage, étaient plus lourds (entre + 3 % et + 2,5 %, P < 0,01), mais à partir de 63j, les poids des 2 groupes étaient redevenus similaires. De plus, au début de la période d'engraissement, les lapins restreints en présevrage semblaient consommer un peu moins ce qui peut expliquer le léger retard de croissance observé.
Cette étude est intéressante pour éventuellement mettre en lumière un effet favorable du rationnement en présevrage, afin de mieux préparer les lapins à un rationnement en engraissement, sachant que cela ne semble pas léser la femelle. Nous pouvons seulement regretter le bon statut sanitaire lors de cet essai ne permettant pas d'y trouver des conclusions complètes
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  b/ l'alimentation en agriculture biologique :
  Un papier français de Goby et al. sur l'alimentation en élevage biologique a testé l'impact de la densité de pâturage (composée de sainfoin, folle avoine, fenouil, lampistrelle, plantain, ray-grass et orge) avec 0,4 m² de pâture quotidienne (3 lapins/enclos, groupe D3) ou 1,2 m²/lapin/jour (1 lapin/enclos, groupe D1), de 45 à 81j d'âge. De manière logique, les groupes de 3 lapins, ont consommé une hauteur d'herbe deux fois plus élevée (30 vs 16 cm consommés, P<0,05). Pour le groupe D1, la consommation de pâturage est passée de 40 à 100 g MS/j/lapin entre le jour 1 de l'essai et le jour 36 (moyenne 75g MS/j), alors qu'elle variait de 25 à 60 g MS/j/lapin pour le groupe D3 (moyenne 38g MS/j), ce qui a eu un impact sur la croissance : 15,5g/j pour le groupe D1 et 8,4g/j pour le groupe D3.
En conclusion, avec l'allocation de pâturage standard du cahier des charges " Bio " (0,4 m²/lapin/jour) la capacité de consommation de pâturage du Lapin n'est pas couverte. Selon la qualité du pâturage, un aliment concentré complémentaire peut être recommandé.
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  3.3. Equilibre nutritionnel de la ration et performances
  6 communications ont traité de l'équilibre de la ration, dont 4 sont présentées ci-dessous
  Deux communications françaises (Rebours et al.), ont étudié l'effet de 2 bases alimentaires (STD (2325 kcal/kg, 15,0% de protéines) et C+ (2400 kcal/kg et 15,4% de protéines)] dans le cadre d'un rationnement horaire progressif (6h/j avec une progression de +1h/semaine), à la fois sur les performances et le comportement alimentaire des animaux.
Les animaux alimentés avec l'aliment C+ ont eu des performances de croissance similaires à ceux du groupe STD, et durant la deuxième période leur consommation a diminué (-5,8g/j), révélant une régulation de la consommation chez les lapins en horaire restreinte en fonction de la concentration nutritionnelle de l'aliment. L'aliment de 3% plus concentré au plan énergétique a permis de réduire de manière non significative de 2,7% l'IC global
Concernant le comportement alimentaire, la concentration alimentaire a légèrement diminué vitesse d'ingestion tout au long de la journée, et elle diminue au cours de l'engraissement.
Cette étude permet de mettre en avant un résultat différent de la concentration nutritionnelle de l'aliment si les lapins sont rationnés quantitativement ou par la durée d'accès à la mangeoire, même si on global, la concentration de l'aliment permet, dans tous les cas de réduire l'IC.
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  Goncalves et al. (Espagne) ont étudié l'effet du ratio Protéines Digestible /Energie digestible sur des lapins en croissance : un régime L a été formulé pour obtenir les recommandations nutritionnelles actuelles pour les lapins à l'engrais (10,7 g PD/MJ; 16,6% de protéines brutes (11,8 PD) et 11,0 MJ ED/kg), tandis que le régime H avait un rapport plus élevé (12,2 g PD/ MJ; 18,2 % de protéines brutes (13,5 PD) et 11,1 MJ/kg). Il en ressort que les animaux nourris avec le régime H ont présenté une prise alimentaire plus forte (+12,5 g de matière sèche/j; P<0,001) et un gain quotidien moyen plus élevé (+4,3 g/j; P<0,001). Aucune différence significative de mortalité et de morbidité n'a été observée entre les régimes alimentaires. Concernant l'IC, les résultats sont étonnants : les animaux nourris avec le régime H ont montré un meilleur IC au cours de la première semaine de croissance (IC réduit de 0,10 unités; P<0,05), tandis que ceux nourris avec le régime L ont montré de meilleurs résultats au cours des deux dernières semaines de l'essai (-0,17 points; P<0,05). Ces résultats suggèrent que le rapport PD/ED approprié pour les lapins en croissance change avec l'âge. En conclusion, l'utilisation d'un rapport PD/ED plus élevé pendant les premières semaines après le sevrage pourrait contribuer à améliorer les performances des lapins en croissance actuels, caractérisés par un taux de croissance élevé, sans compromettre leur état de santé digestive.
Bien que le niveau d'énergie soit identique entre les deux lots, le niveau de protéines brutes est très différent. Il aurait été intéressant de travailler les formules afin d'obtenir un niveau de Protéine digestible différent en maintenant un niveau de protéine brute constant afin de d'étudier réellement l'effet du ratio PD/ED.
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  Une communication française (Raffin et al.) a étudié l'effet du ratio Fibres Digestibles/ADF en engraissement sur les performances et la santé des lapins à l'aide d'une méta-analyse et dans le cadre d'un ratio allant de 0,73 à 1,03.
Pendant toute la période d'engraissement (32 à 71 jours), il y a eu une diminution significative du risque sanitaire digestif (ISR) (P<0,01), de la mortalité et de la morbidité (P<0,05) lorsque le rapport FD/ADF augmentait, avec un effet marqué sur l'entéropathie épizootique du lapin et sur la parésie (P<0,05), notamment en première période d'engraissement. Concernant les performances, le gain moyen quotidien moyen et l'indice de consommation n'ont pas été influencés par ce ratio (P=0.96 et P=0.98 respectivement).Ces résultats suggèrent que l'effet individuel des fibres digestibles et indigestibles sur l'état de santé des lapins peut être optimisé lorsque leur apport respecte un certain équilibre.
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4. Conclusion générale
  Pour l'emploi des matières premières, les différentes communications présentées lors de ce Congrès ont surtout fourni des précisions sur les possibilités d'emploi de matières premières déjà connues. Elles ont fourni un éclairage complémentaire sur des limites d'emploi. Quelques matières premières nouvelles ont cependant été étudiées. De nombreux additifs ont été testés. Tous ne se sont pas avérés efficace. Il est intéressant de constater qu'il est de plus en plus fréquent de voir des équipes de recherche présenter des communication sur les additifs qui n'ont pas tenu l'ensemble de leurs promesses

Pour les techniques d'alimentation nous retiendrons que les études expérimentales sur le rationnement du lapin en croissance ont été nettement plus fréquentes que lors des précédents congrès. Les auteurs ne semblent pas tous d'accord sur leur efficacité, mais en fait le désaccord provient plus du mode d'application du rationnement que du rationnement lui-même.
Enfin, quelques communications ont porté sur le ratio entre différents éléments nutritifs de l'aliment d'engraissement. Les résultats obtenus montrent que c'est un secteur prometteur pour les progrès techniques et économiques de la filière tant pour les lapins en engraissement que pour les lapines reproductrices.