17 mars 2022 - Journée d'étude ASFC «Nantes - Ombres & Lumières»

   

NUTRITION et PHYSIOLOGIE

par

Thierry GIDENNE * et Chantal DAVOUST **

* INRAE Occitanie Toulouse, UMR 1388 GenPhySE, CS 52627 - 31326 Castanet-Tolosan
** Wisium, Rue de l'Eglise 02402 Château-Thierry

a

Cette synthèse recouvre un total de 33 communications courtes, dont 10 proviennent de la section "Nutrition et alimentation", et 23 de la section "Physiologie et biologie", soit 14% des 237 communications courtes acceptées au total par le comité scientifique. Sept de ces 33 communications, n'ont pas été réellement présentées durant le congrès (auteur non inscrit), 15 ont été présentées en distanciel et 11 présentées en salle par l'auteur.
Le classement des communications par nationalité du premier auteur, indique que la Chine arrive en tête du nombre de communications (n=11, figure 1), suivi de la France (6 comm., pays organisateur), puis de l'Algérie et le Nigeria.


Figure 1 : Répartition des communications courtes consacrées à la Nutrition & Physiologie

a
Outre une section physiologie générale et méthodes, nous avons classé ces communications selon les facteurs de contrôle sur la physiologie : effets nutriments ou additifs, etc. Quelques études de physiologie fondamentale (cellules souches, etc.) ne sont pas présentées dans cette synthèse.

a

1. Nouveaux indicateurs et méthodes en physiologie et biologie
Un ensemble de 5 études concerne les méthodes et la recherche de nouveaux prédicteurs de fonctions. Nous en retiendrons trois ci-après.
L'étude de Mussard et al. (INRAE Occitanie-Toulouse) présente une méthode d'étude très originale chez le lapin, de culture "in-vitro" d'organoïde de caecum (culture de cellules d'épithélium) pour étudier les fonctions clé de la digestion : absorption des nutriments et la fonction "barrière". Trois méthodes pour cultiver des organoïdes à partir de cryptes épithéliales (contenant des cellules souches) isolées du caecum de lapin ont été testées. L'une des méthodes semble plus adéquate, puisqu'il est constaté un niveau plus élevé de différenciation des cellules.. Ce modèle in vitro innovant est un outil précieux pour étudier les effets de nutriments ou de micro-organismes sur l'épithélium intestinal du lapin.

Cet outil pourrait aussi être intéressant pour tester l'effet d'additifs zootechniques à incorporer dans des aliments.
L'équipe de génétique de l'IRTA (Barcelone, Velasco-Galilea et al.) a communiqué sur la possibilité de sélectionner des lapins pour l'efficacité alimentaire à partir de mesures sur le microbiote, pour éviter de mesurer la consommation alimentaire individuelle des animaux qui est assez coûteuse. Il s'agit donc de prédire à partir du microbiote caecal des lapins, leur croissance et l'efficacité alimentaire. Le microbiote a été analysé par séquençage (MiSeq) d'ARNr 16S, sur un échantillon de 425 lapereaux provenant de diverses fermes (alimentation avec antibiotiques, excepté pour 23 lapereaux), répartis en 2 groupes égaux au sevrage : l'un nourri ad libitum, l'autre restreint à 75% d'ad libitum. Le microbiote caecal expliquerait ainsi plus de 50% des variations de vitesse de croissance, et respectivement 51 et 59% des variations d'ingestion d'aliment et d'efficacité alimentaire. Par rapport à la croissance seule, la prise en compte d'informations microbiennes améliore le modèle de prédiction de 3 et 10 %, respectivement pour l'ingestion et d'efficacité alimentaire.
a

L'équipe Portugaise de Vila Real (Silva et al.), a développé une méthode pour estimer les dépôts de graisse chez la lapine adulte (poids moyen de 4,5kg), en utilisant des mesures de graisse périrénale obtenues par échographie en temps réel (RTU). A partir des images RTU, les mesures d'épaisseur et de surface de la graisse périrénale ont été déterminées en ayant le rein comme référence anatomique. Les corrélations les plus significatives sont observées entre la somme des différents tissus adipeux et les mesures de poids vifs (BW) et de note état corporel (BCS) et les RTU (r entre 0,52 et 0,92 ; P<0,01). Tous les dépôts adipeux, sauf la graisse inguinale, présentaient des corrélations avec les mesures BW, BCS et RTU (r entre 0,47 et 0,87 ; P<0,01). Ainsi, les estimations de la graisse périrénale obtenues par RTU peuvent être prises en compte pour prédire les dépôts adipeux des lapines.
Cette méthode ne semble pas nécessiter de préparation particulière des animaux avant la mesure, et pourrait donc être utilisable dans des ateliers professionnels.

a

2. Microbiote caecal
  Quatre études portent sur le microbiote caecal et son activité, le plus souvent avec des techniques de séquençage de l'ARNr16S.

Song et al. (Chine, Xi'an, province du Shaanxi) ont comparé le microbiote de lièvres (Lepus Capensis) et de lapins Rex (séquençage ARNr16S), sachant que l'activité fermentaire du lièvre se caractérise par des proportions molaires de propionate et d'isobutyrate plus élevées que celles observées dans le caecum du lapin. Au niveau du phylum, les Firmicutes dominent dans le caecum des lapins Rex sains et diarrhéiques, et Sphaerochaeta domine chez le lièvre. Au niveau des genres, le groupe Christensenellaceae R-7 et le genre non classé Ruminococcaceae sont les plus abondants chez les lapins rex sains, tandis que Escherichia, Shigella, Bacteroides, Bacteroidales S24-7 groupe non classé et le genre non classé Ruminococcaceae sont en plus grand nombre chez les lapins Rex diarrhéiques. Les Sphaerochaeta sont le genre dominant chez les lièvres. Comme l'étude n'a été menée que sur 3 lapins Rex sains et trois malades, et sur trois lièvres, il conviendra d'attendre une confirmation de ces résultats préliminaires.
a
 

L'étude de Paës et al. (INRAE Toulouse) a pour objectif général de pouvoir faire une préparation nutritionnelle en tout début de vie du lapereau, en vue d'une maturation plus précoce du microbiote et rendre l'animal plus résistant aux troubles digestifs. Ainsi, 16 portées ont eu libre accès à un aliment granulé à partir de 15 jours d'âge en plus du lait de leur mère (témoins, groupe C), tandis que 16 autres portées ont disposé d'un aliment "starter" sous forme de gel, dans le nid de 3 à 17 jours d'âge (groupe EF). L'ingestion précoce (au nid) d'un aliment sous forme de gel, même en faible quantité (1,1±0,4 g de MS/lapin pour la période 3-17jours) a augmenté la diversité microbienne (séquençage ARNr16S: +17 points pour l'indice InvSimpson à 30 jours; P=0,018). A partir de 18 jours, la structure des communautés bactériennes du caecum des lapereaux EF était plus proche de la structure du microbiote observée à 58 jours (cf. figure, A) que dans le groupe C, suggérant un état de maturité plus élevé à chaque âge. Avec l'alimentation précoce, le microbiote a acquis des proportions plus importantes de Ruminococcaceae à J18 (P=0,043, +5%), et la diminution attendue des Bacteroidaceae à 25 et 30 jours (-9% et -8% respectivement ; P<0,05; cf. figure 2, B et C) a été plus rapide.a

  L'étude de Paës et al. (INRAE Toulouse) a pour objectif général de pouvoir faire une préparation nutritionnelle en tout début de vie du lapereau, en vue d'une maturation plus précoce du microbiote et rendre l'animal plus résistant aux troubles digestifs. Ainsi, 16 portées ont eu libre accès à un aliment granulé à partir de 15 jours d'âge en plus du lait de leur mère (témoins, groupe C), tandis que 16 autres portées ont disposé d'un aliment "starter" sous forme de gel, dans le nid de 3 à 17 jours d'âge (groupe EF). L'ingestion précoce (au nid) d'un aliment sous forme de gel, même en faible quantité (1,1±0,4 g de MS/lapin pour la période 3-17jours) a augmenté la diversité microbienne (séquençage ARNr16S: +17 points pour l'indice InvSimpson à 30 jours; P=0,018). A partir de 18 jours, la structure des communautés bactériennes du caecum des lapereaux EF était plus proche de la structure du microbiote observée à 58 jours (cf. figure, A) que dans le groupe C, suggérant un état de maturité plus élevé à chaque âge. Avec l'alimentation précoce, le microbiote a acquis des proportions plus importantes de Ruminococcaceae à J18 (P=0,043, +5%), et la diminution attendue des Bacteroidaceae à 25 et 30 jours (-9% et -8% respectivement ; P<0,05; cf. figure 2, B et C) a été plus rapide.
 

Figure 2: Maturation de la communauté bactérienne caecale (A): Les fortes valeurs indiquent une forte dissimilarité des communautés à partir de 58 jours d'âge. Distribution (moyennes± sd) des familles de Bacteroidaceae et de Ruminococcaceae, dans le caecum de lapereaux allaités (B and C).
Groupes : C= témoin; EF= aliment starter (3 à 17j. d'âge).
a
  En parallèle, on observe une augmentation de la concentration en acides gras volatils avant sevrage dans le groupe EF (+25% à 30 jours). Ainsi, une alimentation précoce peut favoriser la maturtion de l'écosystème caecal du lapin avec des effets à long terme. Une mise en place plus rapide d'un microbiote stable favoriserait la maturation du système immunitaire du lapin et réduirait ainsi le risque de dysbiose.
Le fait de pouvoir orienter précocement le microbiote caecal pour avoir une meilleure maitrise du statut sanitaire est une piste intéressante dans le domaine de la nutrition : réduction de l'usage des antibiotiques. Ces résultats doivent être bien sûr confirmés avec des mesures d'impacts sanitaires.
a
  Il est bien connu que les stratégies de restriction alimentaire contribuent à réduire les troubles digestifs post-sevrage du lapin (études du groupe GEC), mais il est bien difficile d'en expliquer les raisons en terme de physiologie. Aussi, l'étude de Knudsen et al. (INRAE Toulouse et groupe GEC) s'intéresse aux conséquences du niveau d'ingestion (quantité ingérée) et de la qualité de l'aliment (concentration énergétique) sur l'écosystème caecal. Une prise alimentaire limitée a ainsi augmenté la proportion d'acétate (+2,8 unités; P<0,001) et a diminué celle de butyrate (-2,4 unités, P<0,001) dans le contenu caecal. Un apport énergétique élevé (régime HE) a principalement diminué le pH caecal (-0,14; P<0,001 ). Par séquençage de l'ARNr16S, les auteurs montrent que 3 familles de bactéries sont modifiées (cf. figure 3): Les Akkermansiaceae ont augmenté avec une consommation énergétique élevée (0,54 vs 0,25%, Padjust <0,05), tandis que les Christensenellaceae ont diminué (2,8 vs 5,6%, P-adjust <0,001). La limitation de l'ingestion favorise les Eubacteriaceae (10,5 vs 6,9%, Padjust <0,05). Ces résultats méritent d'être approfondis pour déterminer le lien de causalité potentiel entre la composition microbienne, l'activité et les impacts sur la santé du lapin.
  Ainsi, l'effet combiné de la quantité d'aliment associé ou non à des pauses alimentaires mériterait d'être étudié pour connaitre l'effet sur le métabolisme. Y a-t-il des profils de microbiote plus favorable pour améliorer l'efficacité alimentaire? Ou pour obtenir une meilleure santé ? D'autres études sont donc à développer sur ces questions.
 

Figure 3 : Modulation des familles bactériennes par l’aliment ± énergétique (HE vs LE) ou le niveau de
restriction alimentaire (75 vs 100%)
a
3. Biologie et Physiologie de la reproduction
  Cinq études portent sur la physiologie de la reproduction, comme la composition du lait ou le développement de la glande mammaire.

La mortalité des lapereaux a été analysée selon l'origine génétique du lait maternel (Amroun et al., coll. Franco-Algérienne, Univ Tizi-Ouzou), et montre des effets importants. Ainsi, des lapines de 2 génotypes (élevés en Algérie, population blanche PB, et souche synthétique SS; 40 par génotype) sont réparties en 4 groupes égaux de 20 lapines: 2 groupes témoins qui ont allaité leurs propres portées et 2 groupes expérimentaux qui ont nourri des portées de l'autre type génétique, sur 3 lactations (240 portées au total). Dans le groupe témoin (lapines élevant leur portée) le taux de mortalité le plus élevé, a été enregistré dans les portées PB recevant du lait PB 18,50 ± 0,18 %. Ce taux a été plus faible pour les portées SS nourries par leur propre mère (12,50 ± 0,01 %, P<0,05). Parmi les 2 groupes des portées adoptées, le taux de mortalité a été de 12,50 ± 0,03 % pour les portées recevant du lait SS, et 27% pour les portées ayant du lait PB. Les profils chromatographiques du lait montrent un polymorphisme des caséines ?s1 et alpha-s2, particulièrement marqué dans le lait PB. Le taux de mortalité le plus faible a été enregistré avec le lait des individus porteurs du variant naturel (NV) de la caséine alpha-s2. Ce taux de mortalité est plus élevé avec le nouveau variant (Var B). L'effet délétère du variant B de la caséine ?s1 (individus NV/B) semble être plus marqué que celui de la caséine ?s2 (32% vs.15%, P<0,05)), probablement dû à un effet cumulatif de la présence de la variante B de la caséine alpha-s2. Dans le cas des lapines PB, la mortalité des portées qu'elles ont élevé a été la plus forte (54,1%) pour les lapines homozygotes VB/VB de la caséine alpha-s2. Pour les lapines hétérozygotes VN/VB elle a été de 15,3% et pour des lapines VB/VN de 38.4% . Enfin pour les lapines homozygotes VN/VN la mortalité a été de 11,7% seulement. Il conviendrait donc de confirmer ces résultats qui pourraient être utiles pour de futurs schémas de sélection de lapines.

a
  Une équipe Italienne (Univ. Piacenza, Minuti et al., com. non présentée) a analysé le statut nutritionnel de lapines (analyse de sang), quelques jours avant mise bas, en fonction de la taille de leur portée. Au-delà de 11 nés totaux dans la portée, les auteurs constatent une plus faible concentration sanguine en thréonine, glycine, lysine et tryptophane, et un taux plus élevé de glutamate. Il y a donc une activité catabolique plus intense chez les lapines avec une grande portée (>11), qui correspond à une plus forte demande énergétique de gestation.
a
  L'équipe du prof. Zerrouki (Univ. Tizi-Ouzou, Algérie) a produit 3 études, sur la physiologie de la reproduction. La première et la seconde rapportent des résultats très classiques, de développement de la glande mammaire durant la lactation (Aroun et al.), et de modification de profils sanguins (Moumen et al.) selon le stade physiologique (lactation, gestation). La troisième (Tlili et al.) compare l'histologie des ovaires de 2 génotypes de lapines (souche synthétique vs population locale). Cette dernière rapporte que le nombre et les mesures des composants folliculaires et ovocytaires (diamètres) révèlent que les lapines de la souche synthétique sont supérieures à celles de la population locale, en termes de fertilité, de productivité et de potentiel ovulatoire.
a
4. Effets de matières premières ou d'additifs
  Cinq études ont été retenues dans cette section.
Une étude Cubaine (Acosta-Acosta et al., non présentée) montre que la caecotrophie est influencée par le taux d'incorporation de fourteau de coprah (0 à 40%): au-delà de 30% d'incorporation de ce tourteau, la production de caecotrophe baisse à 18g de MS/j alors qu'elle est de 25g/j pour 0 ou 10% d'incorporation.
a
  Une étude Française (Guillevic et al.) a analysé les effets de l'incorporation de 5 % d'Omegalest® dans l'aliment (mélange de graines de lin extrudées "Tradilin®", de caroube et de paille de lin) pour élever son taux d'acides gras omega 3 (0,12 à 0,65 % d'acide alpha-linolénique = ALA), sur les performances de reproduction de lapines (3 essais, impliquant 777 lapines, 1221 cycles de reproduction). Aucune différence n'a été observée sur la fertilité (74,5% en moyenne). Le nombre de lapereaux par portée vivants à 4 jours a été augmenté de 10,07 à 10,96 (P<0,001) lorsque le lin a été incorporé dans l'aliment. Cette amélioration s'expliquerait par la teneur élevée en ALA et en lignanes de la graine de lin. Avec l'incorporation d'Omegalest®: le nombre de lapereaux au sevrage/portée a augmenté de 8,69 à 9,67 (P<0,001); la mortalité avant sevrage a chuté de 11,2 à 9,7 % (P=0,006); le poids de la portée au sevrage a augmenté de 7044 à 8026 grammes (P<0,001). Par conséquent, le lin extrudé apparait comme une source importante d'acides gras omega3 et de lignanes, permettant une amélioration des performances de reproduction.
Il reste à déterminer si cet effet favorable pendant l'allaitement est perceptible sur la santé des lapereaux en engraissement.
a
  Trois études ont porté sur les taux de minéraux et vitamines dans l'aliment.
Deux sources de zinc ont été comparées sur la croissance, la qualité de la viande et le dépôt musculaire du lapin (Luis-Chincoya et al., Mexique) en engraissement (35 à 65j d'âge). Un schéma "2 x 2 +1" a été utilisé pour comparer 2 sources de zinc (ZnSO4 ou Zn-Méthionine ) 2 teneurs en zinc ajouté (25 et 75 ppm) et un témoin négatif sans apport de zinc sous forme d'additif dans leqquel les matières premières apportent en principe 25 ppm de zinc. Aucune différence entre les 5 lots n'est détectée sur la croissance ou les caractéristiques de la cuisse. Par contre la coloration de la viande du râble et sa teneur en collagène ont été plus élevées avec le zinc d'origine minérale. L'addition de zinc à l'aliment, en particulier 25 ppm, augmenterait la teneur en zinc du râble : 12,8 vs 9,2 mg/kg pour le témoin (P=0,020). Ce résultat est a prendre avec précaution, car l'ajout de 75 ppm a été sans effet (9.9 mg/kg). Il manque des données d'analyse de zinc dans les aliments.
Les apports complémentaires de zinc se font classiquement sous forme d'oxyde ou de sulfate de zinc, avec des différences déjà démontrées en volaille pour une meilleure disponibilité sous forme sulfate. Il serait pertinent de mesurer la disponibilité réelle du Zinc selon sa forme, chez le lapin en croissance.
a
  Afin de déterminer le niveau optimal d'iode dans les aliments, Bin et al. (Chine, Taian) ont comparé les effets de différents niveaux d'apport d'iode (0 - 0,2 - 0,4 - 0,8 et 1,6 mg/kg d'iode sous forme d'iodure de potassium) sur la croissance et les performances de production de 5 groupes de 40 lapins Rex de 3 mois. Avec l'ajout de 0,8 mg/kg d'iode dans l'aliment, l'ingestion a été plus élevée (184 g/j vs 173 g/j pour le témoin: P < 0,0001). La supplémentation en iode a eu un effet sur le taux de muscle dans la patte arrière et sa coloration rouge (P < 0,05), et a eu un effet sur le taux de muscles de la patte avant (P < 0,01). Ainsi 0,8 mg/kg d'iode serait la supplémentation la plus appropriée dans l'alimentation des lapins en croissance de type Rex entre 3 et 5 mois. Signalons que les apports en iode en alimentation cunicole en France varient 0.2 à 0.3 mg/kg avec une teneur maximum réglementaire en Europe de 10 mg/kg au total (Matières premières + additifs).
a
  Liu et al. (Chine, Jinang) ont étudié les effets de l'addition de vitamine B6, sur le métabolisme musculaire du lapin en croissance, en comparant 5 groupes de 40 lapins, avec 5 niveaux de supplémentation en vitamine B6 (pyridoxine) : 0 (témoin), 5, 10, 20 et 40 mg/kg d'aliment (soit 4,5 - 9,7 - 14,6 - 24,3, et 44,8 mg/kg vitamine B6). L'addition de vitamine B6 alimentaire augmente le pourcentage de muscles des pattes antérieures et postérieures (P<0,05) voire du râble (P<0,08). La comparaison de plusieurs indicateurs montre que l'ajout de vitamine B6 modifie le métabolisme des protéines (accroissement de la sécrétion de IGF1 mais pas de la GH). Les auteurs conseillent une supplémentation en vitamine B6 de 20 mg/kg pour des lapins en croissance entre 3 et 5 mois.
Il serait intéressant d'analyser le coût de cette supplémentation en vitamines B6, par rapport aux effets attendus.
a
5. Physiologie générale
  Le fait de stimuler le comportement de coprophagie chez le lapereau entre 7 et 15 jours d'âge (consommation de fèces dures maternelles) pourrait réduire la mortalité (INRAE : Combes et al., 2014; J. Anim. Sci.) et stimule la maturation du microbiote. Pour faire suite à cette étude Cauquil et al. (INRAE Toulouse) font l'hypothèse que cet effet positif de la coprophagie précoce sur la santé pourrait provenir d'une médiation immunitaire au niveau intestinal. Les auteurs ont ainsi comparé le transcriptome de l'iléon de lapereaux chez lesquels le comportement de coprophagie était stimulé (groupes FF, et FF+antibiotiques donnés à la lapine donneuse de fèces), à celui de lapereaux chez lesquels ce comportement était empêché (groupe NF).
a
  Par analyse du transcriptome de la muqueuse iléale (mesure semi-quantitative des ARN totaux exprimés, sur puce Agilent "lapin"), un total de 209 gènes a été exprimé de manière différentielle (DE) selon l'âge (35 et 49j, P<0,05). Entre 35 et 49 jours, le groupe FF présentait 350 gènes DE tandis que les groupes NF et FF+ab ne présentaient respectivement que 10 et 9 gènes DE (P<0,05). Les gènes régulés à la hausse codaient pour les peptides antimicrobiens, la production de mucine, les cytokines et les chimiokines, les récepteurs de reconnaissance de formes et les protéines impliquées dans la sécrétion d'immunoglobuline A ou les réponses antivirales. Ainsi, l'effet bénéfique du comportement coprophage sur la survie des lapereaux pourrait être médié par une activation immunitaire dans l'iléon. Signalons que, l'effet de la coprophagie sur l'expression des gènes immunitaires intestinaux n'est pas observé lorsque les lapereaux ont ingéré des fèces produits par des lapines consommant des antibiotiques, probablement parce que des bactéries immunostimulantes clés étaient manquantes.
a
 
Deux études chinoises s'intéressent à la physiologie de l'absorption dans l'intestin grêle. L'équipe de Chen et al., (Baoding, Chine) a quantifié les ARNm dans l'intestin grêle (PCR quantitative), pour analyser la distribution des gènes liés au transport de nutriments (oligopeptides, acides aminés, glucose, acides gras). Les résultats indiquent que l'absorption des oligopeptides, du glucose et des acides gras se fait surtout dans le duodénum, tandis l'absorption des acides aminés se fait majoritairement dans l'iléon.
D'autre part, Liu H et al. (Taian, Chine) analysent comment le stress perturbe la digestion et l'absorption des nutriments, en montrant une baisse de l'expression de gènes de transports de nutriments dans différents segments de l'intestin grêle, chez des lapins traités à la dexaméthasone.

a
  Deux autres études chinoises s'intéressent à la physiologie du poil chez l'Angora. L'étude de Chen Y et al. (Yangzhou, Chine) analyse la régénération périodique du follicule pileux pour trouver un moyen efficace d'augmenter la production de poil chez l'Angora. Ainsi, par analyse de transcriptome (ARNnc et ARNm), il a été découvert que lncRNA2919 pouvait inhiber la régénération périodique des follicules pileux du lapin. Ce résultat donne une nouvelle idée pour conduire la sélection de lapins Angora et donc améliorer la production de poil angora.
  La seconde étude (Ding et al., Hefei, Chine) a caractérisé l'histologie du follicule pileux et les profils miRNA. De nouveaux miRNAs, potentiellement impliqués dans le cycle de croissance des poildu lapin, ont été identifiés, ce qui peut servir pour de futures études fonctionnelles du cycle de production des poils du lapin Angora.
a
  Signalons aussi 2 études chinoises en physiologie fondamentale. L'une porte sur la physiologie musculaire par analyse de l'expression de microRNA (Zhang et al., Chengdu, Chine), qui identifie de nouvelles voies de régulation. L'autre porte sur la physiologie (morphogenèse et le développement) embryonnaire du lapin par analyse globale des ARN longs et non codants (lncRNA) et ARN circulaires (Kuang et al., Chengdu, Chine). Plusieurs ARN candidats seraient impliqués dans les voies de signalisation indispensables pour la morphogenèse et le développement des embryons du lapin.
a
  Trois études Africaines ont porté sur la physiologie de la thermorégulation. La question de la réduction du stress thermique du lapin a été étudiée par une équipe Egyptienne (El Gindy et al., Alexandrie), qui indiquerait qu'une supplémentation alimentaire en manno-oligosaccharide pourrait améliorer la tolérance à la chaleur, le profil lipidique et l'état immunitaire des lapins, stressés par la chaleur.
Les effets du stress thermique ont été étudiés par une équipe de la République Démocratique du Congo (Mutwedu et al., Bukavu), chez des lapines nullipares élevées à 31-32°C et 35-36°C pendant 30 jours: ce stress thermique provoquerait un stress oxydatif et des troubles physiologiques.
L'étude de Popoola (Ibadan, Nigeria) a décrit quelques mécanismes thermorégulateurs sur 288 lapins, par analyse statistique de corrélations entre des paramètres tels que la température rectale, la fréquence respiratoire et le pouls, et des paramètres de climat (température ambiante, humidité relative).
Le stress thermique est une réalité terrain et des stratégies alimentaires sont aujourd'hui mises en place pour réduire l'impact de la réduction de la consommation d'aliments en période forte chaleur via des aliments plus concentrés ou l'ajout d'additifs zootechniques permettant de limiter le stress.
a
6. Conclusions
  La section physiologie et biologie était une des plus importante du congrès avec finalement 35 papiers acceptés, sachant que d'autres communications traitaient aussi de physiologie mais étaient placées dans diverses sections. Du point de vue des méthodes, on note une majorité d'études utilisant des outils moléculaires, et en particulier pour analyser l'expression de gênes en lien avec diverses fonctions physiologiques: immunité, microbiote, fonctions intestinales. Quelques résultats originaux ont contribué à améliorer nos connaissances sur le microbiote et la digestion. Pour plusieurs études, les résultats sont "préliminaires", et certaines mériteraient d'être confirmées.